Dépression: un antidépresseur et quoi d’autre?

L’antidépresseur doit être accompagné de mesures thérapeutiques et d’hygiène de vie : la psychothérapie mais aussi  l’activité physique, l’alimentation, le sommeil font partie du soin d’une dépression.

Pour une dépression caractérisée, le traitement antidépresseur est essentiel. Cependant, la personne souffrante, peut prendre par elle-même,  des mesures de vie qui peuvent améliorer son état et accélérer la sortie de l’état dépressif.

Lors d’un récent Congrès de L’Encéphale, en 2023

le professeur Antoine Yrondi de Toulouse, a fait le point sur ce sujet très important pour les patients et pour les soignants en psychiatrie. Il nous met sur la voie de ce qui se vérifie en ce domaine. Il s’appuie sur des recommandations découlant de nombreuses études internationales. De façon très mesurée, il rassemble ces recommandations issues d’études portant sur des nombres non négligeables de personnes déprimées: études principalement américaines, canadiennes, australiennes…

Notons que ces mesures visent l’amélioration rapide des symptômes de la dépression mais également ont pour but de favoriser la rémission et d’éviter la rechute. Mais, ces mesures, à elles seules, ne suffiront pas à traiter un état dépressif caractérisé. C’est en association avec le traitement médicamenteux qu’elles développent tout leur potentiel.

L’association antidépresseur et psychothérapie pour soigner la dépression

Ainsi, 53 études portant sur un total de 3623 patients montre l’effet favorable de l’association d’une psychothérapie au traitement médicamenteux. Il s’agit surtout dans ces études de Thérapies comportementalo-cognitivistes (TCC), de Thérapies Interpersonnelles (TIP) mais aussi des Psychothérapies psychodynamiques (dont nous rapprochons les psychothérapies psychanalytiques). Se sentir aidé par une personne compétente et attentive à votre souffrance ainsi qu’à votre fonctionnement psychique, est une composante essentielle de l’accompagnement nécessaire.

Cette  pratique, devrait être facilitée voire généralisée par le remboursement des séances de psychothérapie menées par des psychologues, encore insuffisant en France. Les pouvoirs publics semblent en avoir pris conscience.

La reprise de l’activité physique est essentielle dans la dépression : comment ?

De fait, il faudrait se mettre ou se remettre à des activités physiques régulières selon un plan prévu avec la personne.

  • plusieurs fois par semaine (jusqu’à 10 heures au total ) voire quotidiennement
    • en plein air : vélo, marche à pied, course,
    • ou en salle (maniement de poids..)
  • la personne étant seule le plus souvent, ou mieux, encadrée par un kinésithérapeute. Mais elle pourra aussi trouver sur le Net des programmes de ré-entrainement. La progressivité est essentielle.
  • basée sur des activités déjà pratiquées ou de nouvelles. Elles permettent de retrouver progressivement du plaisir. Ou encore, elles  permettent de surmonter la perte de plaisir que la dépression a provoquée. Il s’agit du plaisir physique et psychique. C’est ainsi qu’on luttera contre le sentiment de dévalorisation. La personne retrouvera progressivement confiance en ses capacités à surmonter la lourde épreuve de la dépression.
  • Notons qu’il faut tenir compte des symptômes actuels : fatigue, ralentissement psychique et moteur, perte d’envie.. Mais encore de leur évolution.

L’alimentation doit être mieux orientée pour améliorer la dépression

En effet, de nombreuses études sont en faveur du régime méditerranéen, maintenant, bien connu avec :

  • Une augmentation importante des légumes et des fruits dans l’alimentation quotidienne
  • Une réduction des graisses “saturées”. Or, on les trouve dans les produits d’origine animale : viande, charcuterie, fromage, laitages non écrémés, beurre, pâtisseries, chocolat..
  • C’est pourquoi, on insiste sur l’intérêt des graisses insaturées : l’huile d’olive, de colza, les noix, les graines, le pain complet
  • Mais aussi, en donnant la préférence aux aliments frais sur les produits préparés industriellement
  • Notons que les oméga 3 sont recommandés : on les trouve dans les poissons gras (hareng, saumon, morue..) Ou encore en compléments alimentaires sous forme de comprimés (posologie : entre 1 et 2 g par jour)
  • Essentiel : réduction de la consommation d’alcool et de tabac
  • Les probiotiques semblent montrer une certaine efficacité dans de petites études portant sur 300 personnes
  • Mais aussi une supplémentation en zinc, complément alimentaire, jusqu’à 25 mg par jour : étude réalisée sur 100 personnes.
  • Ces deux dernières indications restent à confirmer sur de plus grands nombres

La luminothérapie dans toutes les dépressions

  • Recommandée fortement depuis plusieurs années dans les dépressions saisonnières, la luminothérapie améliore aussi les autres dépressions. Les résultats sont meilleurs, lorsqu’il y a association d’un médicament psychotrope et de la luminothérapie.
  • Les séances de luminothérapie auront lieu le matin, pour régulariser ou restaurer les rythme circadien (alternance, veille, sommeil)
  • A raison de 10000 lux, pendant 30 minutes, à 30 cm de la lampe de bonne qualité (marquée CE).
  • Les lunettes de luminothérapie sont d’un usage très facile dans le quotidien
  • En fin de matinée, la sortie de chez soi et donc l’exposition au soleil, tous les jours, est très importante

L’éducation thérapeutique

Il s’agit d’une large gamme de mesure de compréhension des causes de la dépression et de ses traitements. Mais aussi d’apprentissages.

Par exemple :

  • connaître la maladie dépressive, la prévention des récidives et oser parler des idées suicidaires;
  • comprendre, choisir et s’approprier les différentes thérapeutiques
  • favoriser la meilleure observance possible : elle est souvent en défaut. Une proportion considérable de patient ne prend pas ou pas régulièrement le traitement prescrit.
  • identifier et remobiliser les ressources personnelles et de l’entourage du patient
  • sensibiliser et former les personnes ressources dans les familles
  • mieux connaitre la prévention du suicide et des autres conduites à risque (alcool.. addictions..)
  • Par exemple des groupes d’éducation thérapeutique sont très suivis dans le cadre de l’Association Argos 2001 surtout orientée vers la bipolarité.

Sources : Plusieurs éléments rapportés dans cet article ont été recueillis lors d’une conférence “Les recommandations sont-elles recommandables? dans le cadre du Congrès de l’Encéphale du 18 janvier 2023.

Président : Prs Philippe FOSSATI, Présidente : Pr Marie TOURNIER, Expert : Pr Serge BEAULIEU

Interventions du Pr Antoine Yrondi, du Pr Bénédicte Gohier et du Pr Ludovic Samalin

 

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